L’excellence du repas à la française
L’UNESCO a classé en 2010 le repas gastronomique à la française au patrimoine immatériel de l’humanité. Cette distinction prestigieuse marque la reconnaissance officielle de l’excellence française en matière de gastronomie.
Cette excellence est étroitement liée au prestige de l’art de la table français, qui contribue à la renommée des grandes tables. Il s’agit aussi d’un rituel culturel qui n’existe nulle par ailleurs, bien que le rayonnement de l’art de la table à la française soit aujourd’hui mondialement reconnu.
En effet, en France l’art de la table fait concrètement partie de la culture et résulte de siècles de travail et d’histoire mais surtout de savoir-faire unique au monde.
Une culture riche et remontant au Moyen Age
L’art de la table existe depuis longtemps, même s’il a été relativement rudimentaire pendant une longue période : au Moyen Age par exemple, l’absence d’assiettes n’empêchait pas une culture très codifiée de la prise des repas. On utilisait tailloirs et tranchoirs, la nourriture étant servie sur du pain, lui-même déposé sur une planche de bois. Seule la matière de la planche variait selon le prestige de la table : or et argent aux tables de la noblesse, bois sur les tables des paysans.
C’est donc la monarchie qui a fait évoluer l’art de la table, en conférant à ce moment privilégié qu’est le repas une élégance et un raffinement hors du commun. La richesse et le pouvoir sont mis en évidence de façon ostentatoire et cela passe par des usages très normés, qui construisent un art de la table au comble du raffinement, notamment sous le règne de Louis XIV.
Le pouvoir en place, à travers ses hommes politiques, permet également de créer des manufactures royales (porcelaine, orfèvrerie…) installant officiellement une excellence française qui rayonnera progressivement dans le monde entier.
Art de la table et révolutions
Ce sont ensuite les différentes révolutions qui vont venir transformer notre gastronomie et nos rituels de repas, bouleversant dans le même temps l’art de la table tel qu’il existait sous les grandes monarchies. La révolution française provoque de fait une émigration massive des aristocrates mais leur domesticité reste en partie sur le sol français. Tout le savoir lié à l’art de la table est alors utilisé à travers l’ouverture des premiers restaurants, dont l’apparition modifie totalement la façon de servir la nourriture, qui ne peut plus être apportée à table à raison d’une dizaine de plats à la fois.
Après les restaurants viennent les palaces, drainant une clientèle riche et exigeante. Ces palaces commandent aux orfèvres et aux porcelainiers des collections spécifiques pour leur maison, toujours dans un souci de magnificence et de raffinement extrême, tant pour la nourriture servie que dans la façon de la présenter et de la servir. Restaurants et palaces – qui marquent l’apogée de la bourgeoisie – créent donc par phases successives une nouvelle culture dans la façon de recevoir, de préparer les repas et de les servir à table.
Cette culture sera portée et amplifiée par les révolutions industrielles, qui permettront des innovations techniques majeures : nouveaux matériaux, nouvelles formes, nouveaux usages et coûts de fabrication et de transports réduits. On voit notamment l’apparition de l’inox, de la verrerie mécanique, de la porcelaine pressée.
En parallèle, les révolutions sociales modifient nos habitudes de repas, qui ont peu à peu fait de l’art de la table un univers affranchi de ses codes les plus stricts. Aujourd’hui l’art de la table est devenu un loisir, toujours lié aux plaisirs gastronomiques et mettant en valeur, avec des usages nouveaux, plus décontractés mais riches de siècles d’histoire, l’art unique du repas à la française.